vendredi 20 décembre 2013

Bizerte 1961, la dernière bataille coloniale de la France

En 1961, la France connaît les derniers affres de la décolonisation. Elle a successivement abandonné l'Indochine en 1954, accordé l'indépendance au Maroc et à la Tunisie en 1955 puis à l'Afrique noire en 1960. En Algérie, en proie à la violence depuis 1954, la victoire du « oui » au référendum du 8 janvier 1961 ouvre, selon la volonté du général de Gaulle, le chemin de l'autodétermination puis de l'indépendance de cette dernière terre française en Afrique.

Ce processus historique ne se fait pas sans résistances, ni tensions. Ainsi la perspective d'une indépendance algérienne à court terme conduit une partie de l'armée à se lancer dans un putsch raté en avril 1961. Si le pouvoir civil surmonte l'épreuve sans difficulté et même raffermi, l'armée, même si elle est restée majoritairement loyaliste, reste profondément ébranlée par les soubresauts de la décolonisation.

Dans la Tunisie, indépendante depuis 1955, le président Habib Bourguiba comprend que l'évolution de la situation en Algérie et les difficultés françaises ouvrent des perspectives nouvelles pour son pays. Il tourne ses regards vers l'immensité saharienne où il n'existe toujours pas de frontières bien précises. Il sait que s'ouvre alors une fenêtre d'opportunité pour agrandir son pays vers le sud en direction du désert et des champs pétrolifères découverts par les ingénieurs français. Les puits des régions d'Hassi-Messaoud et d'Edjeleh sont en effet voisins de la Tunisie. Mais de Gaulle n'a aucune intention de donner satisfaction à Bourguiba. Il ne veut pas remettre en cause la future coopération avec l'Algérie dont la recherche et l'exploitation du pétrole saharien doivent être des éléments centraux. Et puis que répondre au Maroc qui lorgne sur Colomb-Béchar et Tindouf, à la Mauritanie, au Mali, au Niger et à la Libye, si la France accepte les revendications tunisiennes.

Bourguiba craint également son futur face à face avec une Algérie indépendante alors qu'il est déjà brouillé avec le Maroc et surtout l'Égypte après avoir accusé le colonel Nasser d'avoir voulu le faire assassiner. Pour redorer son image ternie dans un monde arabe en pleine évolution, Bourguiba a besoin d'un coup d'éclat qui redore son image de dirigeant anti-impérialiste.

David FRANCOIS.



Au début des années 1960 la Tunisie reste encore étroitement liée à la France. Son commerce extérieur se fait toujours essentiellement avec l'ancienne métropole tandis que prés de 60 000 Français vivent en Tunisie comme agriculteurs, commerçants ou techniciens. Les rapports entre les deux pays n'ont pas été sans tensions depuis 1955, notamment au moment de l'incident de Sakiet Sidi Youssef. Le 7 février 1958, l'aviation française à bombardé le camp de l'armée de libération nationale algérienne situé à coté de ce village tunisien près de la frontière algérienne. Bourguiba a alors fait rappelé son ambassadeur à Paris et a demandé que l'armée française évacue totalement le sol tunisien notamment la base navale de Bizerte.

La montée de la tension.
Cette base est d'un intérêt stratégique majeur pour la France et a d'ailleurs justifié l'établissement du protectorat français sur le pays en 1881. Dès l'année suivante, les Français aménagent une base navale dans ce qui n'est encore qu'un petit port de pêche qui devient rapidement un maillon essentiel de la présence navale française en Méditerranée. Selon la convention d'autonomie interne du 3 juin 1955 qui règle les modalités de l'accession à l'indépendance de la Tunisie, la France conserve une autorité militaire sur deux zones qui forment la base navale. Mais dès la proclamation de l'indépendance cette présence français à Bizerte est une pomme de discorde entre les deux pays. Bourguiba profite ainsi de la crise de Sakiet pour exiger de Paris la restitution de Bizerte et l'évacuation des troupes françaises. Mais pour de Gaulle cet abandon n'est pas envisageable. La base représente en effet un point stratégique d'importance, une vigie entre le bassin occidental et le bassin oriental de la Méditerranée qui contrôle le trafic maritime entre Gibraltar et le Proche-Orient. La base est d'ailleurs directement reliée au Strategic Air Command de l'OTAN à Casablanca afin de prévenir une éventuelle attaque soviétique. Dans le contexte d'une guerre froide qui s'exacerbe avec la construction du Mur de Berlin, la France ne peut donc abandonner Bizerte.

La base de Bizerte en 1961 (source: Wikipedia)


C'est le moment que choisit Bourguiba pour faire de la base navale l'enjeu d'une confrontation avec la France en exigeant son évacuation immédiate. De Gaulle n'est pas opposé à l'évacuation mais il demande un délai d'un an, le temps que la France se dote de l'arme atomique. La situation apparaît vite bloquée et la tension ne cesse de monter entre les deux pays. Quand l'amiral français qui dirige la base, Maurice Amman, fait savoir en mai 1961 aux Tunisiens que les militaires vont commencer des travaux d'agrandissement de la piste d'atterrissage de Sidi Ahmed qui doit déborder d'1,50 m sur le territoire tunisien, Bourguiba tient le prétexte pour une épreuve de force.

Le 15 juin, les militaires français qui s'activent sur ce chantier sont sommés de partir. Le 22, les autorités tunisiennes décident que les Français qui veulent se rendre en permission à Tunis devront dorénavant recevoir un laissé passer du gouverneur de Bizerte. Le 24, c'est l'amiral Amman en personne qui est refoulé alors qu'il voulait se rendre à Tunis. Pour apaiser la situation il décide de suspendre les travaux en cours mais les Tunisiens commencent à construire un mur autour de la base. Les entreprises tunisiennes reçoivent également l'ordre de ne plus travailler pour les Français. Autour de Bizerte, le parti nationaliste de Bourguiba, le Néo-Destour, organise des manifestations pour demander l'évacuation et réclamer des armes.

Le 6 juillet des milliers de manifestants encadrés par le Néo-Destour défilent dans les rues de Bizerte pour demander le départ des Français. Puis l'ensemble du pays est le théâtre de démonstrations identiques où des milliers de jeunes volontaires déclarent vouloir se rendre à Bizerte pour en découdre. Le même jour des ouvriers tunisiens creusent des tranchées prés des installations militaires françaises, notamment le terrain d'aviation de Sidi Ahmed. Pour de Gaulle il est impensable d'accepter les revendications tunisiennes dans de telles conditions.

Le 3 juillet, le secrétaire d'état à la défense tunisien s'est rendu à Bizerte pour visiter les casernes et les travaux autour de la base. L'armée tunisienne dispose alors de 12 bataillons d'infanterie, d'un groupe d'artillerie, d'un groupe de transport du train, d'un bataillon de transmissions, d'un escadron mixte composé de 5 chars M24, de 5 obusiers et de 22 half-tracks. La marine et l'aviation tunisienne, en cours de formation, n'ont aucune valeur opérationnelle. Prés de 6 000 volontaires des Jeunesses Destouriennes, dont un millier a reçu des armes, sont acheminés vers Bizerte ainsi que 200 gardes nationaux, qui peuvent servir de commandos de choc.

Le président tunisien Habib Bourguiba (source: Wikipedia)


A compter de la mi-juillet le Néo-Destour organise des manifestations quotidiennes à Bizerte avec des jeunes venu de Tunis et du sud du pays. Le 7 juillet les mouvements de troupes tunisiennes se multiplient tandis qu'un mortier est mis en batterie près de la gare de Sidi Ahmed. A partir du 15 juillet les Tunisiens mettent en place des barrages tandis que des épaulements d'arme automatiques sont aménagés. Amman demande alors des instructions à Paris dans l'éventualité d'une action de force contre la base. Le premier ministre Michel Debré ordonne de répondre par la force à l'usage de la force.

Amman met au point un plan qui doit permettre de garder le contrôle de la base. Il envisage de renforcer les effectifs par le biais d'un parachutage de renforts pour ensuite prendre le contrôle de l'ensemble de la ville de Bizerte. Le 12, l'amiral il demande l'envoi d'un régiment de parachutistes en renfort. Le 15 juillet, le 2e RPIMA est mis en alerte à Blida, ainsi que le 3e RPIMA à Zeralda, le 3e REI et 2 escadrons du 8e Hussard à Bone et Medea. Mais l'opération envisagée par Amman est délicate. Si la France ne veut pas passer aux yeux de l'opinion internationale pour l'agresseur il faut que le parachutage de troupes se déroule peu après le début de l'attaque tunisienne mais avant que ces derniers n'atteignent la base. L'ordre final de passer à l'attaque doit de toute les manières, revenir au général de Gaulle.

Le 17 juillet, devant l'assemblée nationale tunisienne, Bourguiba exige l'évacuation immédiate de la base de Bizerte et la délimitation des frontières au sud avec l'Algérie. Il fixe à la France un ultimatum qui doit expirer le 19. Dans le même temps l'armée tunisienne est mise en alerte renforcée. Le gouvernement français de son coté organise une flotte navale pour soutenir la base qui comprend le croiseur De Grasse, les escorteurs Chevalier Paul et La Bourdonnais et le porte-avions Arromanches.

La base navale est peu à peu investie par trois bataillons tunisiens qui mettent en place dans la journée du 19 juillet des barrages et des postes de contrôle pour interdire les circulations entre les secteurs de la base. Les barrages sont prolongés par des tranchées le long des routes. Ils sont tenus par des groupes de 20 à 50 hommes armés composés de policiers, de gardes nationaux, de soldats et de volontaires civils. L'armée tunisienne occupe ses positions de combats. Au sud les Tunisiens pénètrent en Algérie pour occuper une petite zone qu'ils revendiquent. Des véhicules français sont arrêtés à Bizerte et leurs passagers sont faits prisonniers. Au total ce sont 30 militaires et 22 civils qui se retrouvent ainsi internés à Sousse comme prisonniers de guerre.

Pour défendre la base les Français disposent de la supériorité dans le domaine naval et aérien. Mais au sol ils ne peuvent compter que sur environ 7 500 hommes dont 3 500 sont chargés de la défense proprement dite d'un périmètre de trente kilomètres. De Gaulle, qui ne veut pas céder au chantage de Bourguiba, donne son feu vert à une opération militaire baptisée du nom de code de Bouledogue. Le 19, en début d'après midi, les autorités tunisiennes interdisent tout survol de leur territoire par des avions, cela dans le but d'empêcher l'arrivée de parachutistes français. Elles font mettre en batterie des canons et des mortiers autours de la piste d'atterrissage de Sidi Ahmed. Les abords du goulet de Bizerte sont occupés par les soldats tunisiens. Amman reçoit alors de Paris l'autorisation d'ouvrir le feu pour répondre à une attaque.


La base est attaquée.
Les Français doivent faire face à plusieurs difficultés: la base est étendue et répartie entre de nombreuses enceintes. Les collines qui la dominent, notamment le terrain d'aviation, ne sont pas sous le contrôle des troupes françaises et donc sous le feu des Tunisiens. Cette situation pose un problème de taille car cette unique piste est indispensable à la fois pour frapper l'adversaire par les airs mais aussi pour faire parvenir des renforts.

Militaires français à Bizerte (Source: live2times.com)


Le 19 juillet l'armée tunisienne prend ses positions de combat et met en batterie des armes lourdes, des pièces d'artillerie et antichars. En début d'après-midi un hélicoptère Alouette français est la cible de tirs. Un canon antichar tunisien et installé à l'extrémité de la piste de Sidi Ahmed, un autre à la ferme Vittoz dans l'axe de la piste et des mortiers à la gare de Sidi Ahmed et sur les collines au nord de la base. Dans l'après-midi, 4 Corsairs décollent pour assurer la sécurité de la base ainsi que celle des parachutistes qui sont en route. Vers 18h, les 414 paras du 2e RPIMA commandés par le chef de bataillon Mollo, sautent sur Sidi Ahmed. Les mitrailleuses tunisiennes tirent sur les parachutistes. La seconde vague de paras n'est pas largué du ciel mais débarqué à terre par des Nord 2501. A peine atterri, les transporteurs français sont pris à partie par des armes automatiques et des canons antichars. Deux Mistrals et deux Corsairs décollent alors et neutralisent les canons tunisiens puis mitraillent les positions ennemies.


Les paras français en action à Bizerte (source: leader.com.tn)


Au soir du 19 juillet, la zone A de la base est scindée en quatre tronçons entre lesquels la circulation est désormais impossible. Vers 19h, les Tunisiens passent à l'attaque. Les hommes du 8e RIA répondent par des tirs à l'arme automatique. Le commandant de la zone A reçoit l'ordre de faire sauter les barrages qui coupent la zone. Au matin du 20, les Tunisiens repartent à l'attaque contre la porte de Bizerte et la porte de Tunis avec des armes automatiques et un bazooka. La menace d'une intrusion dans la base se précise, l'ouverture d'une brèche dans l'enceinte faire courir le risque que des milliers de civils tunisiens fassent irruption dans la base.

Pour dégager la position deux Corsairs de la 17F effectuent des tirs de roquettes et de mitrailleuses tandis qu'une compagnie du 2e RPIMA part porter secours à la zone A. L'amiral Picard-Destelan qui commande celle-ci donne l'ordre d'exploiter la situation créée par le passage des Corsairs pour dégager les abords de la porte de Bizerte où l'ennemi reste retranché, rejoindre le secteur de la Pyrotechnie qui est isolé et nettoyer les îlots de résistance. A la fin de la journée ces différentes missions sont accomplies.

Sur la zone B où se trouve la piste de Sidi Ahmed, les Tunisiens bombardent dès les premières heures du 20 juillet et mettent ainsi en danger son utilisation par les appareils français. Au petit matin tandis que des Corsairs et des Mistrals attaquent les positions ennemies, des hommes du 2e RPIMA marchent sur la gare de Sidi Ahmed où ils sont durement accrochés, nécessitant à nouveau l'intervention de l'aviation. La 2e compagnie du 2e RPIMA s'empare du Djebel Chellouf au nord tandis que la 4e compagnie et la compagnie portée progressent difficilement dans le sud. Partout les troupes françaises sortent des enceintes de la base pour desserrer l'étau tunisien.

Les paras français à Bizerte (source: encyclopedie-afn.org)


La situation est plus difficile autour de la cimenterie et du poste de commandement de la base car les Français manquent de réserves tandis que le dégagement de la piste d'aviation reste toujours prioritaire. Dans la matinée, des civils tunisiens, dont certains sont en armes, manifestent devant la porte principale de la baie Ponty tandis que les militaires tunisiens continuent de tirer.

A l'ouest de Sidi Ahmed, le 2e RPIMA s'empare du marabout de Sidi Zid après des combats au corps à corps et du village de Djaffeur. Au début de l'après-midi le 3e RPIMA débarque à son tour sur la piste de Sidi Ahmed et se lance dans l'attaque de la gare qui est nettoyée. La piste d'aviation est définitivement dégagée. Au nord le 3e RPIMA occupe le djebel Chellouf et attaque le Zergoum où les soldats doivent affronter une forte résistance menée par la 10e bataillon tunisien de retour du Congo. L'aviation intervient obligeant les Tunisiens à décrocher. Les Français sont alors maîtres des crêtes du djebel Zergouh qui dominent la base.

La situation s'aggrave à Sidi Salah, à la baie Ponty, à la cimenterie. A la fin de l'après-midi les Corsairs français bombardent la cimenterie puis des éléments du 2e RPIMA et le détachement blindée du 8e RIA passent à l'attaque et s'emparent de la cimenterie. En zones C et D, avec l'aide de l'aviation, les troupes françaises parviennent également à sécuriser les abords de la base. Quand la nuit arrive les installations vitales ne sont plus sous la menace des armes tunisiennes.

Pour empêcher tout mouvement des navires français de la base, les Tunisiens ont tendu des câbles en acier en travers du goulet. Pour libérer cette zone vitale, les Français lancent l'opération Ficelle. La difficulté réside dans le fait que la zone est également un quartier d'habitation au cœur de Bizerte.


Les Français prennent Bizerte
Au matin du 21 juillet, les unités disponibles des 2e et 3e RPIMA avancent sur Bizerte sans bénéficier ni de l'appui de l'artillerie, ni de celle de l'aviation. Les forces françaises sont divisées en deux sous-groupements appelés Indigo et Patrimoine Gris. Indigo avance en direction de la porte de Mateur. La progression est difficile et les Tunisiens résistent avec force. Mais l'arrivée des renforts du 3e REI qui vient de débarquer à Sidi Ahmed facilite la progression. Patrimoine Gris avance sur la rive sud du goulet. A la fin de la journée la ville européenne est conquise après de violents combats et les troupes françaises atteignent la mer dans la soirée. A la fin de la journée chaque groupement a atteint son objectif et le goulet est dégagé.

Dans la journée du 22 juillet, les Français se donnent pour mission d'élargir le périmètre sous leur contrôle. Dans le nord de Bizerte le sous-groupement Amarante s'empare des forts de Koudia et d'Espagne. Pendant ce temps le nettoyage de la ville européenne se poursuit, parfois avec des combats violents. La presqu’île de Menzel Djemel est conquise et le secteur au nord-ouest de Sidi Ahmed est dégagé. Bizerte et ses alentours sont alors sous le contrôle des troupes françaises à l'exception de la Médina, la vieille ville musulmane qui reste aux mains des autorités tunisiennes.

Face à face entre les militaires français et la population tunisienne (source: jeuneafrique.com)



Vers la fin du conflit.
Le 20 juillet, alors que les combats se déroulent autour de la base, la Tunisie saisit le Conseil de sécurité de l'ONU qui se réunit les 21 et 22 juillet à propos de Bizerte. L'ensemble des États membres, sauf la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, vote pour le retrait de l'armée française et demande la fin des combats. En coulisse les Américains qui veulent maintenir la Tunisie dans le camp occidental se démènent pour ramener le calme entre Français et Tunisiens.

Le 22, Paris demande à l'amiral Amman de mettre fin aux opérations offensives. A cette date les Français contrôlent militairement Bizerte et ses alentours. Les Tunisiens acceptent alors de signer un accord de cessez-le-feu qui prend effet le 23 à 8 heures.

Le 24, Dag Hammarskjöld, le secrétaire général de l'ONU, arrive à Bizerte. Il n'est pas reçu par le commandant français de la base mais reçoit la permission de visiter les prisonniers tunisiens. Bourguiba maintient toujours la pression sur la France. Des civils français sont arrêtés dans la région et deviennent des otages. Le 17 août, Amman doit mettre à nouveau la base en état d'alerte après les menaces de manifestations violentes dans la ville. Bourguiba quand à lui refuse toute négociation directe avec la France sur la question de la base navale française et s'en remet aux Nations Unies.

Le 18 août, des centaines de civils dirigé par le maire de Bizerte et les militants du Néo-Destour manifestent et se heurtent aux militaires français. Des combats s'engagent mais le calme revient peu à peu et les Français restent toujours maîtres de la ville. Le 25, une résolution de l'ONU votée par les pays africains et asiatiques condamne la France.

Le 5 septembre, de Gaulle réaffirme la souveraineté de la Tunisie sur Bizerte mais également l'impossibilité pour la sécurité de la France de quitter la base avant la fin de la guerre d'Algérie. Bourguiba se déclare satisfait par la déclaration du président français et propose à la France de conserver la base jusqu'à la fin de la crise inaugurée par la construction du Mur de Berlin. Les Tunisiens libèrent alors des civils français tandis que le 10 septembre 780 prisonniers tunisiens sont échangés contre 218 prisonniers français.

Les paras contrôlent l'accès à la base de Bizerte (source: leader.com.tn)


Le 17 septembre les négociations commencent concernant l'évacuation de la ville de Bizerte par les troupes française et leur repli sur la base. Le 29, l'accord est conclu et les opérations d'évacuation débutent sans aucun incident le 2 octobre 1961.

Le 1er juillet 1962 les Français évacuent l'arsenal de Sidi-Abdellah et le 19, le général de Gaulle annonce aux Tunisiens sa décision de retirer les troupes françaises de Tunisie dans les 18 mois. Les accords d'Evian, qui mettent fin à la guerre d'Algérie garantissant à la France l'usage de la base de Mers el-Kébir pendant 15 ans, ne rendent plus nécessaires la présence française à Bizerte. Le 15 octobre, les militaires français quittent définitivement la base mettant fin à une présence de plus de 80 ans. Ce jour devient celui de la fête nationale de la Tunisie tandis que deux mois plus tard, le 15 décembre 1962, Bourguiba reçoit à Bizerte, le président égyptien Nasser, l'algérien Ben Bella, le prince héritier de Libye et un représentant du roi du Maroc.


Conclusion.
La bataille de Bizerte est un succès pour les militaires français qui n'ont perdu que 27 soldats tués et 128 blessés. Les Tunisiens par contre comptent plusieurs milliers de morts, 4 000 selon l'historien Mohamed Lazhar Gharbi. L'organisation et le professionnalisme des troupes françaises soutenus par la présence d'avions de combats, d’hélicoptères, d'unités de chars et d'artillerie a facilement raison d'une armée tunisienne qui n'a que cinq ans d'existence. Le principal responsable du désastre tunisien à Bizerte est certainement le président Bourguiba qui, en ne prenant pas l'avis des militaires, avant d'engager l'épreuve de force, a commis une erreur stratégique.


Bibliographie:
Damien Cordier-Féron, « Bizerte 1961: 666 morts pour une base inutile », Guerre et Histoire, n°6, avril 2012.
Robert Gaget, La saga des paras, Grancher, 1998.
Patrick-Charles Renaud, La bataille de Bizerte, L'Harmattan, 1996.


1 commentaire:

  1. Merci encore pour ce résumé didactique. Les parachutistes français ont du de la chance que la Tunisie ne possédait pas de DCA notable.

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