En
1961, la France connaît les derniers affres de la décolonisation.
Elle a successivement abandonné l'Indochine en 1954, accordé
l'indépendance au Maroc et à la Tunisie en 1955 puis à l'Afrique
noire en 1960. En Algérie,
en proie à la violence depuis 1954, la victoire du « oui »
au référendum du 8 janvier 1961 ouvre, selon la volonté du général
de Gaulle, le chemin de l'autodétermination puis de l'indépendance
de cette dernière terre française en Afrique.
Ce
processus historique ne se fait pas sans résistances, ni tensions.
Ainsi la perspective d'une indépendance algérienne à court terme
conduit une partie de l'armée à se lancer dans un putsch raté en
avril 1961. Si le pouvoir civil surmonte l'épreuve sans difficulté
et même raffermi, l'armée, même si elle est restée
majoritairement loyaliste, reste profondément ébranlée par les
soubresauts de la décolonisation.
Dans
la Tunisie, indépendante depuis 1955, le président Habib Bourguiba
comprend que l'évolution de la situation en Algérie et les
difficultés françaises ouvrent des perspectives nouvelles pour son
pays. Il tourne ses regards vers l'immensité saharienne où il
n'existe toujours pas de frontières bien précises. Il sait que
s'ouvre alors une fenêtre d'opportunité pour agrandir son pays vers
le sud en direction du désert et des champs pétrolifères
découverts par les ingénieurs français. Les puits des régions
d'Hassi-Messaoud et d'Edjeleh sont en effet voisins de la Tunisie.
Mais de Gaulle n'a aucune intention de donner satisfaction à
Bourguiba. Il ne veut pas remettre en cause la future coopération
avec l'Algérie dont la recherche et l'exploitation du pétrole
saharien doivent être des éléments centraux. Et puis que répondre
au Maroc qui lorgne sur Colomb-Béchar et Tindouf, à la Mauritanie,
au Mali, au Niger et à la Libye, si la France accepte les
revendications tunisiennes.
Bourguiba
craint également son futur face à face avec une Algérie
indépendante alors qu'il est déjà brouillé avec le Maroc et
surtout l'Égypte après avoir accusé le colonel Nasser d'avoir
voulu le faire assassiner. Pour redorer son image ternie dans un
monde arabe en pleine évolution, Bourguiba a besoin d'un coup
d'éclat qui redore son image de dirigeant anti-impérialiste.
David FRANCOIS.
Au
début des années 1960 la Tunisie reste encore étroitement liée à
la France. Son commerce extérieur se fait toujours essentiellement
avec l'ancienne métropole tandis que prés de 60 000 Français
vivent en Tunisie comme agriculteurs, commerçants ou techniciens.
Les rapports entre les deux pays n'ont pas été sans tensions depuis
1955, notamment au moment de l'incident de Sakiet Sidi Youssef. Le 7
février 1958, l'aviation française à bombardé le camp de l'armée
de libération nationale algérienne situé à coté de ce village
tunisien près de la
frontière algérienne. Bourguiba a alors fait rappelé son
ambassadeur à Paris et a demandé que l'armée française évacue
totalement le sol tunisien notamment la base navale de Bizerte.
La
montée de la tension.
Cette
base est d'un intérêt stratégique majeur pour la France et a
d'ailleurs justifié l'établissement du protectorat français sur le
pays en 1881. Dès l'année suivante, les Français aménagent une
base navale dans ce qui n'est encore qu'un petit port de pêche qui
devient rapidement un maillon essentiel de la présence navale
française en Méditerranée. Selon la convention d'autonomie interne
du 3 juin 1955 qui règle les modalités de l'accession à
l'indépendance de la Tunisie, la France conserve une autorité
militaire sur deux zones qui forment la base navale. Mais dès la
proclamation de l'indépendance cette présence français à Bizerte
est une pomme de discorde entre les deux pays. Bourguiba profite
ainsi de la crise de Sakiet pour exiger de Paris la restitution de
Bizerte et l'évacuation des troupes françaises. Mais pour de Gaulle
cet abandon n'est pas
envisageable. La base représente en effet un point stratégique
d'importance, une vigie entre le bassin occidental et le bassin
oriental de la Méditerranée qui contrôle le trafic maritime entre
Gibraltar et le Proche-Orient. La base est d'ailleurs directement
reliée au Strategic Air Command de l'OTAN à Casablanca afin de
prévenir une éventuelle attaque soviétique. Dans le contexte d'une
guerre froide qui s'exacerbe avec la construction du Mur de Berlin,
la France ne peut donc abandonner Bizerte.
La base de Bizerte en 1961 (source: Wikipedia)
C'est
le moment que choisit
Bourguiba pour faire de la base navale l'enjeu d'une confrontation
avec la France en exigeant son évacuation immédiate. De Gaulle
n'est pas opposé à l'évacuation mais il demande un délai d'un an,
le temps que la France se dote de l'arme atomique. La situation
apparaît vite bloquée et la tension ne cesse de monter entre les
deux pays. Quand l'amiral français qui dirige la base, Maurice
Amman, fait savoir en mai 1961 aux Tunisiens que les militaires vont
commencer des travaux d'agrandissement de la piste d'atterrissage de
Sidi Ahmed qui doit déborder d'1,50 m sur le territoire tunisien,
Bourguiba tient le prétexte pour une épreuve de force.
Le 15
juin, les militaires français qui s'activent sur ce chantier sont
sommés de partir. Le 22, les autorités tunisiennes décident que
les Français qui veulent se rendre en permission à Tunis devront
dorénavant recevoir un laissé passer du gouverneur de Bizerte. Le
24, c'est l'amiral Amman en personne qui est refoulé alors qu'il
voulait se rendre à Tunis. Pour apaiser la situation il décide de
suspendre les travaux en cours mais les Tunisiens commencent à
construire un mur autour de la base. Les entreprises tunisiennes
reçoivent également l'ordre de ne plus travailler pour les
Français. Autour de Bizerte, le parti nationaliste de Bourguiba, le
Néo-Destour, organise des manifestations pour demander l'évacuation
et réclamer des armes.
Le 6
juillet des milliers de manifestants encadrés par le Néo-Destour
défilent dans les rues de Bizerte pour demander le départ des
Français. Puis l'ensemble du pays est le théâtre de démonstrations
identiques où des milliers de jeunes volontaires déclarent vouloir
se rendre à Bizerte pour en découdre. Le même jour des ouvriers
tunisiens creusent des tranchées prés des installations militaires
françaises, notamment le terrain d'aviation de Sidi Ahmed. Pour de
Gaulle il est impensable d'accepter les revendications tunisiennes
dans de telles conditions.
Le 3
juillet, le secrétaire d'état à la défense tunisien s'est rendu à
Bizerte pour visiter les casernes et les travaux autour de la base.
L'armée tunisienne dispose alors de 12 bataillons d'infanterie, d'un
groupe d'artillerie, d'un groupe de transport du train, d'un
bataillon de transmissions, d'un escadron mixte composé de 5 chars
M24, de 5 obusiers et de 22 half-tracks. La marine et l'aviation
tunisienne, en cours de formation, n'ont aucune valeur
opérationnelle. Prés de 6 000 volontaires des Jeunesses
Destouriennes, dont un millier a reçu des armes, sont acheminés
vers Bizerte ainsi que 200 gardes nationaux, qui peuvent servir de
commandos de choc.
Le président tunisien Habib Bourguiba (source: Wikipedia)
A
compter de la mi-juillet le Néo-Destour organise des manifestations
quotidiennes à Bizerte avec des jeunes venu de Tunis et du sud du
pays. Le
7 juillet les mouvements de troupes tunisiennes se multiplient tandis
qu'un mortier est mis en batterie près de la gare de Sidi Ahmed. A
partir du 15 juillet les Tunisiens mettent en place des barrages
tandis que des épaulements d'arme automatiques sont aménagés.
Amman demande alors des instructions à Paris dans l'éventualité
d'une action de force contre la base. Le premier ministre Michel
Debré ordonne de répondre par la force à l'usage de la force.
Amman
met au point un plan qui doit permettre de garder le contrôle de la
base. Il envisage de renforcer les effectifs par le biais d'un
parachutage de renforts pour ensuite prendre le contrôle de
l'ensemble de la ville de Bizerte. Le
12, l'amiral il demande l'envoi d'un régiment de parachutistes en
renfort. Le 15 juillet, le 2e RPIMA est mis en alerte à Blida, ainsi
que le 3e RPIMA à Zeralda, le 3e REI et 2 escadrons du 8e Hussard à
Bone et Medea. Mais
l'opération envisagée par Amman est délicate. Si la France ne veut
pas passer aux yeux de l'opinion internationale pour l'agresseur il
faut que le parachutage de troupes se déroule peu après le début
de l'attaque tunisienne mais avant que ces derniers n'atteignent la
base. L'ordre final de passer à l'attaque doit de toute les
manières, revenir au général de Gaulle.
Le 17
juillet, devant l'assemblée nationale tunisienne, Bourguiba exige
l'évacuation immédiate de la base de Bizerte et la délimitation
des frontières au sud avec l'Algérie. Il fixe à la France un
ultimatum qui doit expirer le 19. Dans le même temps l'armée
tunisienne est mise en alerte renforcée. Le gouvernement français
de son coté organise une flotte navale pour soutenir la base qui
comprend le croiseur De Grasse, les escorteurs Chevalier
Paul et La Bourdonnais et le porte-avions Arromanches.
La
base navale est peu à peu investie par trois bataillons tunisiens
qui mettent en place dans la journée du 19 juillet des barrages et
des postes de contrôle pour interdire les circulations entre les
secteurs de la base. Les barrages sont prolongés par des tranchées
le long des routes. Ils sont tenus
par des groupes de 20 à 50 hommes armés composés de policiers, de
gardes nationaux, de soldats et de volontaires civils. L'armée
tunisienne occupe ses positions de combats. Au sud les Tunisiens
pénètrent en Algérie pour occuper une petite zone qu'ils
revendiquent. Des véhicules français sont arrêtés à Bizerte et
leurs passagers sont faits prisonniers. Au total ce sont 30
militaires et 22 civils qui se retrouvent ainsi internés à Sousse
comme prisonniers de guerre.
Pour
défendre la base les Français disposent de la supériorité dans le
domaine naval et aérien. Mais au sol ils ne peuvent compter que sur
environ 7 500 hommes dont 3 500 sont chargés de la défense
proprement dite d'un périmètre de trente kilomètres. De Gaulle,
qui ne veut pas céder au chantage de Bourguiba, donne son feu vert à
une opération militaire baptisée du nom de code de Bouledogue. Le
19, en début d'après midi, les autorités tunisiennes interdisent
tout survol de leur territoire par des avions, cela dans le but
d'empêcher l'arrivée de parachutistes français. Elles font mettre
en batterie des canons et des mortiers autours de la piste
d'atterrissage de Sidi Ahmed. Les abords du goulet de Bizerte sont
occupés par les soldats tunisiens. Amman reçoit alors de Paris
l'autorisation d'ouvrir le feu pour répondre à une attaque.
La
base est attaquée.
Les
Français doivent faire face à plusieurs difficultés: la base est
étendue et répartie entre
de nombreuses enceintes. Les collines qui la dominent, notamment le
terrain d'aviation, ne sont pas sous le contrôle des troupes
françaises et donc sous le feu des Tunisiens. Cette situation pose
un problème de taille car cette unique piste est indispensable à la
fois pour frapper l'adversaire par les airs mais aussi pour faire
parvenir des renforts.
Militaires français à Bizerte (Source: live2times.com)
Le
19 juillet l'armée tunisienne prend ses positions de combat et met
en batterie des armes lourdes, des pièces d'artillerie et antichars.
En début d'après-midi un hélicoptère
Alouette français est la cible de tirs. Un canon antichar tunisien
et installé à l'extrémité de la piste de Sidi Ahmed, un autre à
la ferme Vittoz dans l'axe de la piste et des mortiers à la gare de
Sidi Ahmed et sur les collines au nord de la base. Dans l'après-midi,
4 Corsairs décollent pour assurer la sécurité de la base ainsi que
celle des parachutistes qui sont en route. Vers 18h, les 414 paras du
2e RPIMA commandés par le chef de bataillon Mollo, sautent sur Sidi
Ahmed. Les mitrailleuses tunisiennes tirent sur les parachutistes. La
seconde vague de paras n'est pas largué du ciel mais débarqué à
terre par des Nord 2501. A peine atterri, les transporteurs français
sont pris à partie par des armes automatiques et des canons
antichars. Deux Mistrals et deux Corsairs décollent alors et
neutralisent les canons tunisiens puis mitraillent les positions
ennemies.
Les paras français en action à Bizerte (source: leader.com.tn)
Au
soir du 19 juillet, la zone A de la base est scindée en quatre
tronçons entre lesquels la circulation est désormais impossible.
Vers 19h, les Tunisiens passent à l'attaque. Les hommes du 8e RIA
répondent par des tirs à l'arme automatique. Le commandant de la
zone A reçoit l'ordre de faire sauter les barrages qui coupent la
zone. Au matin du 20, les Tunisiens repartent à l'attaque contre la
porte de Bizerte et la porte de Tunis avec des armes automatiques et
un bazooka. La menace d'une intrusion dans la base se précise,
l'ouverture d'une brèche dans l'enceinte faire courir le risque que
des milliers de civils tunisiens fassent irruption dans la base.
Pour
dégager la position deux Corsairs de la 17F effectuent des tirs de
roquettes et de
mitrailleuses tandis qu'une compagnie du 2e RPIMA part porter secours
à la zone A. L'amiral Picard-Destelan qui commande celle-ci donne
l'ordre d'exploiter la situation créée par le passage des Corsairs
pour dégager les abords de la porte de Bizerte où l'ennemi reste
retranché, rejoindre le secteur de la Pyrotechnie qui est isolé et
nettoyer les îlots de résistance. A la fin de la journée ces
différentes missions sont accomplies.
Sur
la zone B où se trouve la piste de Sidi Ahmed, les Tunisiens
bombardent dès les premières heures du 20 juillet et mettent ainsi
en danger son utilisation par les appareils français. Au petit matin
tandis que des Corsairs et des Mistrals attaquent les positions
ennemies, des hommes du 2e RPIMA marchent sur la gare de Sidi Ahmed
où ils sont durement accrochés, nécessitant à nouveau
l'intervention de l'aviation. La 2e compagnie du 2e RPIMA s'empare du
Djebel Chellouf au nord tandis que la 4e compagnie et la compagnie
portée progressent difficilement dans le sud. Partout les troupes
françaises sortent des enceintes de la base pour desserrer l'étau
tunisien.
Les paras français à Bizerte (source: encyclopedie-afn.org)
La
situation est plus difficile autour de la cimenterie et du poste de
commandement de la base car les Français manquent de réserves
tandis que le dégagement de la piste d'aviation reste toujours
prioritaire. Dans la matinée, des civils tunisiens, dont certains
sont en armes, manifestent
devant la porte principale de la baie Ponty tandis que les militaires
tunisiens continuent de tirer.
A
l'ouest de Sidi Ahmed, le 2e RPIMA s'empare du marabout de Sidi Zid
après des combats au corps à corps et du village de Djaffeur. Au
début de l'après-midi le 3e RPIMA débarque à son tour sur la
piste de Sidi Ahmed et se lance dans l'attaque de la gare qui est
nettoyée. La piste d'aviation est définitivement dégagée. Au nord
le 3e RPIMA occupe le djebel Chellouf et attaque le Zergoum où les
soldats doivent affronter une forte résistance menée par la 10e
bataillon tunisien de retour du Congo. L'aviation intervient
obligeant les Tunisiens à décrocher. Les Français sont alors maîtres des crêtes du djebel Zergouh qui dominent la base.
La
situation s'aggrave à Sidi Salah, à la baie Ponty, à la
cimenterie. A la fin de l'après-midi les Corsairs français
bombardent la cimenterie puis des éléments du 2e RPIMA et le
détachement blindée du 8e RIA passent à l'attaque et s'emparent de
la cimenterie. En zones C et D, avec l'aide de l'aviation, les
troupes françaises parviennent également à sécuriser les abords
de la base. Quand la nuit arrive les installations vitales ne sont
plus sous la menace des armes tunisiennes.
Pour
empêcher tout mouvement des navires français de la base, les
Tunisiens ont tendu des
câbles en acier en travers du goulet. Pour libérer cette zone
vitale, les Français lancent l'opération Ficelle. La difficulté
réside dans le fait que la zone est également un quartier
d'habitation au cœur de Bizerte.
Les
Français prennent Bizerte
Au
matin du 21 juillet, les unités disponibles des 2e et 3e RPIMA
avancent sur Bizerte sans bénéficier ni de l'appui de l'artillerie,
ni de celle de l'aviation. Les forces françaises sont divisées en
deux sous-groupements appelés Indigo et Patrimoine Gris. Indigo
avance en direction de la porte de Mateur. La progression est
difficile et les Tunisiens résistent avec force. Mais l'arrivée des
renforts du 3e REI qui vient de débarquer à Sidi Ahmed facilite la
progression. Patrimoine Gris avance sur la rive sud du goulet. A la
fin de la journée la ville européenne est conquise après de
violents combats et les troupes françaises atteignent la mer dans la
soirée. A la fin de la journée chaque groupement a atteint son
objectif et le goulet est dégagé.
Dans
la journée du 22 juillet, les Français se donnent pour mission
d'élargir le périmètre sous leur contrôle. Dans le nord de
Bizerte le sous-groupement Amarante s'empare des forts de Koudia et
d'Espagne. Pendant ce temps le nettoyage de la ville européenne se
poursuit, parfois avec des combats violents. La presqu’île de Menzel Djemel est conquise et le secteur au nord-ouest de Sidi Ahmed est
dégagé. Bizerte et ses alentours sont alors sous le contrôle des
troupes françaises à l'exception de la Médina, la vieille ville
musulmane qui reste aux mains des autorités tunisiennes.
Face à face entre les militaires français et la population tunisienne (source: jeuneafrique.com)
Vers
la fin du conflit.
Le 20
juillet, alors que les combats se déroulent autour de la base, la
Tunisie saisit le Conseil de sécurité de l'ONU qui se réunit les
21 et 22 juillet à propos de Bizerte. L'ensemble des États membres,
sauf la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, vote pour le
retrait de l'armée française et demande la fin des combats. En
coulisse les Américains qui veulent maintenir la Tunisie dans le
camp occidental se démènent pour ramener le calme entre Français
et Tunisiens.
Le
22, Paris demande à l'amiral Amman de mettre fin aux opérations
offensives. A cette date les Français contrôlent militairement
Bizerte et ses alentours. Les Tunisiens acceptent alors de signer un
accord de cessez-le-feu qui prend effet le 23 à 8 heures.
Le
24, Dag Hammarskjöld, le secrétaire général de l'ONU, arrive à
Bizerte. Il n'est pas reçu par le commandant français de la base
mais reçoit la permission de visiter les prisonniers tunisiens.
Bourguiba maintient toujours la pression sur la France. Des civils
français sont arrêtés dans la région et deviennent des otages. Le
17 août, Amman doit mettre à nouveau la base en état d'alerte après
les menaces de manifestations violentes dans la ville. Bourguiba
quand à lui refuse toute négociation directe avec la France sur la
question de la base navale française et s'en remet aux Nations
Unies.
Le 18
août, des centaines de civils dirigé par le maire de Bizerte et les
militants du Néo-Destour manifestent et se heurtent aux militaires
français. Des combats s'engagent mais le calme revient peu à peu et
les Français restent toujours maîtres de la ville. Le 25, une
résolution de l'ONU votée par les pays africains et asiatiques
condamne la France.
Le 5
septembre, de Gaulle réaffirme la souveraineté de la Tunisie sur
Bizerte mais également l'impossibilité pour la sécurité de la
France de quitter la base avant la fin de la guerre d'Algérie.
Bourguiba se déclare satisfait par la déclaration du président
français et propose à la France de conserver la base jusqu'à la
fin de la crise inaugurée par la construction du Mur de Berlin. Les
Tunisiens libèrent alors des civils français tandis que le 10
septembre 780 prisonniers tunisiens sont échangés contre 218
prisonniers français.
Les paras contrôlent l'accès à la base de Bizerte (source: leader.com.tn)
Le 17
septembre les négociations commencent concernant l'évacuation de la
ville de Bizerte par les troupes française et leur repli sur la
base. Le 29, l'accord est conclu et les opérations d'évacuation
débutent sans aucun incident le 2 octobre 1961.
Le
1er juillet 1962 les Français évacuent l'arsenal de Sidi-Abdellah
et le 19, le général de Gaulle annonce aux Tunisiens sa décision
de retirer les troupes françaises de Tunisie dans les 18 mois. Les
accords d'Evian, qui mettent fin à la guerre d'Algérie garantissant
à la France l'usage de la base de Mers el-Kébir pendant 15 ans, ne
rendent plus nécessaires la présence française à Bizerte. Le 15
octobre, les militaires français quittent définitivement la base
mettant fin à une présence de plus de 80 ans. Ce jour devient celui
de la fête nationale de la Tunisie tandis que deux mois plus tard,
le 15 décembre 1962, Bourguiba reçoit à Bizerte, le président
égyptien Nasser, l'algérien Ben Bella, le prince héritier de Libye
et un représentant du roi du Maroc.
Conclusion.
La
bataille de Bizerte est un succès pour les militaires français qui
n'ont perdu que 27 soldats tués et 128 blessés. Les Tunisiens par
contre comptent plusieurs milliers de morts, 4 000 selon l'historien
Mohamed Lazhar Gharbi. L'organisation et le professionnalisme des
troupes françaises soutenus par la présence d'avions de combats,
d’hélicoptères, d'unités de chars et d'artillerie a facilement
raison d'une armée tunisienne qui n'a que cinq ans d'existence. Le
principal responsable du désastre tunisien à Bizerte est
certainement le président Bourguiba qui, en ne prenant pas l'avis
des militaires, avant d'engager l'épreuve de force, a commis une
erreur stratégique.
Bibliographie:
Damien
Cordier-Féron, « Bizerte 1961: 666 morts pour une base
inutile », Guerre et Histoire, n°6, avril 2012.
Robert
Gaget, La saga des paras, Grancher, 1998.
Patrick-Charles
Renaud, La bataille de Bizerte, L'Harmattan, 1996.
Merci encore pour ce résumé didactique. Les parachutistes français ont du de la chance que la Tunisie ne possédait pas de DCA notable.
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